Les bactéries et la pathogénicité

La fable du microbiote : le ver, l'intestin et la grande ourse

Fun fact : Les bactéries contribuent également à la création de tes encas préférés tels que les cornichons, le levain (le pain), le yaourt et de nombreux types de fromages.
Personnes contact : Catherine Guynet (chargée de recherche CNRS) : catherine.guynet@univ-tlse3.fr
Romane Dusfour-Castan (doctorante) :
romane.dusfour–castan@univ-tlse3.fr

Photo originale

Bactéries fluorescentes Ochrobactrum vermis installée dans l’intestin du ver C.elegans.

L’objectif de cette expérience était de caractériser l’installation d’une des bactéries du microbiote intestinal de Caenorhabditis elegans et de déterminer la localisation de la bactérie dans les différentes parties de son intestin.
C.elegans est un ver d’un millimètre de long, qui a pour avantage d’être transparent. Ceci permet ainsi la visualisation au microscope à fluorescence des bactéries présentes dans son intestin ; comme par exemple ici la bactérie Ochrobactrum vermis portant un marqueur fluorescent jaune.

Crédits photos : @Romane Dusfour-Castan et @Catherine Guynet

Escherichia coli

Famille : Enterobacteriaceae

Forme : bâtonnet

Type : Gram négatif

Découverte : en 1885, par Theodor Escherich

Adresse : tube digestif

Spécificité : bactérie commensale dont la plupart des souches sont inoffensives, celles produisant des shigatoxines sont pathogènes.

Pathologies : gastroentérite, infection urinaire, méningite ou sepsis

Explications

Qu’est-ce que le microbiote ?
Le microbiote est composé d’un ensemble de micro-organismes (bactéries, archaea, micro-champignons, protistes) vivant tous ensemble dans un environnement défini. Il existe des microbiotes partout, sur et dans tous les humains et les animaux, mais aussi sur les plantes, dans le sol ou encore dans l’eau. Les microbiotes sont essentiels pour maintenir l’équilibre de tous les écosystèmes. Le microbiote le plus étudié est le microbiote humain, qui est très varié (intestinal, cutané, vaginal, pulmonaire, buccal…). Il est composé de plusieurs centaines d’espèces, et principalement des bactéries. Il existe au moins autant de bactéries que de cellules dans notre corps.

A quoi sert le microbiote ?
Contrairement à ce que l’on pense, très peu de bactéries sont pathogènes, c’est-à-dire capables de provoquer des maladies. Au contraire, les bactéries sont indispensables à la vie, et par exemple, elles nous aident à la digestion des aliments, nous protègent contre les maladies en empêchant la croissance de bactéries pathogènes. La qualité et la quantité du microbiote se modifient avec l’âge, après une maladie, un stress, un traitement antibiotique, des modifications de l’hygiène de vie ou de l’alimentation peuvent en effet modifier le microbiote de façon plus ou moins durable. Des bactéries résidentes du microbiote peuvent parfois, dans certaines conditions, agir comme un agent pathogène. Les déséquilibres du microbiote, appelés dysbioses, peuvent aussi être à l’origine de certaines maladies auto-immunes et inflammatoires.

Le microbiote intestinal
Le microbiote intestinal est le plus connu et le plus étudié. Il est propre à chaque personne, un peu comme l’empreinte digitale. Sur les 160 espèces bactériennes présentes chez un adulte en bonne santé, seulement une vingtaine serait retrouvée chez tout le monde. Le microbiote intestinal aurait un rôle à la fois dans les fonctions digestives, métaboliques, immunitaires et neurologiques.

Etude des microbiotes
Les microbiotes présents dans l’environnement sont eux aussi fragiles. De nombreux facteurs peuvent les déséquilibrer, comme par exemple le dérèglement climatique ou la pollution, ce qui peut avoir de nombreuses conséquences sur la santé des êtres vivants, des sols, des mers…
L’étude des microbiotes est compliquée tant il est difficile de les reproduire en laboratoire. Souvent les micro-organismes présents dans ces communautés complexes ne sont pas cultivables. Depuis peu, les techniques de séquençage haut débit du matériel génétique, associées notamment à des analyses de métabolomique (analyse des composants présents dans une cellule), permettent de déterminer plus précisément la composition des microbiotes et de mieux les comprendre. Une autre approche qui est développée par les scientifiques est l’assemblage de microbiotes simplifiés, avec des micro-organismes choisis pour la facilité de leur manipulation et parfois des organoïdes, c’est-à-dire des versions simplifiées d’organes. Cependant, les interactions entre le microbiote et leur hôte ou leur environnement, celles des micro-organismes entre eux, ou encore l’impact des dysbioses restent encore mal connues.

Exemple de l’étude du microbiote du ver Caenorhabditis elegans
Au laboratoire, nous utilisons le microbiote intestinal naturel d’un petit ver d’environ 1mm, le nématode Caenorhabditis elegans comme modèle pour nos études. C. elegans est trouvé sur tous les continents, dans le sol, le compost, les fruits en décomposition et se nourrit principalement de bactéries. C. elegans est un organisme modèle très étudié en physiologie, génétique et développement animal depuis les années 1950. Il présente de nombreux avantages, notamment une grande facilité de manipulation, son cycle de reproduction très court (3 à 5 jours) permettant d’obtenir un grand nombre d’individus très rapidement. En laboratoire, il est classiquement nourri avec une seule bactérie Escherichia coli. Ce n’est que très récemment, en 2016, que son microbiote naturel a été séquencé, ouvrant la possibilité d’utiliser cet animal comme modèle d’étude pour le microbiote. Un microbiote simplifié du nématode a été établi. Il est composé d’une douzaine de bactéries environnementales de plusieurs classes (α-, β- et γ-protéobactéries et bactéroidetes). Ce modèle nous permet d’étudier comment les différentes bactéries s’installent dans l’intestin depuis la naissance des vers, quels facteurs influencent la composition du microbiote, quels sont les impacts du microbiote sur la résistance des vers face à des pathogènes, et même comment les bactéries s’échangent des informations génétiques comme des gènes de résistances aux antibiotiques dans cet écosystème complexe (voir le panneau « Born to move »).

Un autre avantage de C. elegans est qu’il est transparent, ce qui permet d’observer les bactéries de son microbiote intestinal sous le microscope à fluorescence.