Escherichia coli : organisme modèle de laboratoire

Escherichia coli : notre plus fidèle amie !

Fun fact : Dans le monde vivant les fluorochromes peuvent être utilisés pour se camoufler (pour imiter le scintillement des étoiles dans l’eau) ou attirer des proies dans les abysses.

Personne contact : Marie-Pierre Castanié-Cornet
Maitresse de conférences : marie-pierre.castanie-cornet@univ-tlse3.fr

Photo originale

Microscopie à fluorescence d’une culture d’Escherichia coli
L’image est le résultat de la superposition des images prise en contraste de phase et en fluorescence. En noir : entérobactéries Escherichia coli visualisées en contraste de phase sur un microscope à champ large. Grossissement optique 100X, les bactéries mesurent entre 1 et 3 micromètres (soit le 1/50éme du diamètre moyen d’un cheveu). En cyan : petite molécule d’ADN circulaire, le plasmide F d’E. coli, localisée par des fluorochromes mTurquoise fusionnés à des protéines de liaison spécifiques à l’ADN du plasmide F.

Crédits photos : ©Jérôme Rech

Escherichia coli

Famille : Enterobacteriaceae

Forme : bâtonnet

Type : Gram négatif

Découverte : en 1885, par Theodor Escherich

Adresse : tube digestif

Spécificité : bactérie commensale dont la plupart des souches sont inoffensives, celles produisant des shigatoxines sont pathogènes.

Pathologies : gastroentérite, infection urinaire, méningite ou sepsis

Explications

Les bactéries sont présentes dans tous les écosystèmes. Elles sont les êtres vivants les plus anciens (~3 milliards d’années) et sont indispensables à la vie des autres organismes, dont la nôtre, en remplissant de nombreuses fonctions. Elles possèdent une capacité remarquable d’adaptation rapide à leur environnement, en modifiant leur physiologie et en échangeant, combinant des gènes.
En 1965, André Lwoff, Jacques Monod et François Jacob reçoivent le prix Nobel de physiologie et/ou médecine pour leurs recherches concernant « le contrôle génétique de la synthèse des enzymes et des virus ». La microbiologie est alors à son apogée en tant que modèle. Si la microbiologie en est là, c’est parce que dans les années 50, a émergé l’idée de donner aux bactéries le statut d’organisme modèle.

© UNIVERSAL PHOTO/SIPA
Les Lauréats du prix Nobel de médecine 1965 – de gauche à droite – François Jacob, spécialiste en génétique cellulaire, Jacques Monod spécialiste en chimie et André Lwoff spécialiste en microbiologie.

Les travaux réalisés sur ces organismes « simples » (unicellulaire, une seule cellule est un individu) devaient alors permettre de comprendre des phénomènes biologiques et de les extrapoler aux autres organismes, plus complexes (multicellulaire, l’individu est composé d’un assemblage de plusieurs cellules).
L’étude de la propagation des virus bactériens (voir panneau « Un Alien qui nous veut aussi du bien ! ») à partir d’une bactérie infectée deviendra le catalyseur qui transformera la microbiologie en une science quantitative puis « moléculaire ». C’est Escherichia coli et ses virus qui serviront de modèle principal d’études. Ainsi, pendant une trentaine d’années vont s’accumuler les plus importantes découvertes de la biologie : la confirmation de la nature du matériel génétique (l’ADN), sa structure, son code, le mécanisme et les acteurs de la réplication de l’ADN (recopie), l’expression de l’information génétique et sa régulation (voir panneau « Born to move ! » ), la synthèse protéique, les mécanismes moléculaires de la recombinaison et de la réparation de l’ADN (voir panneau « Quand les bactéries se transforment …»)) et bien d’autres.
Les découvertes de ce domaine et les concepts qui en ont découlé, auront une influence capitale dans l’étude des autres procaryotes mais aussi dans celle des eucaryotes et de leurs virus et plus tard celle des archées. Cette influence va permettre une forte accélération du développement des connaissances biologiques.

Représentation schématique de l’opéron lactose et de la boucle de régulation positive du lactose issue des différents travaux de François Jacob, Jacques Monod et André Lwoff.
Les gènes sont représentés par les traits horizontaux. Les flèches fines représentent l’expression des gènes. La protéine codée par lacI est un régulateur négatif (répresseur LacI) qui empêche l’expression des gènes lacY (perméase) et lacZ (βgalactosidase) (trait gras).
La perméase facilite l’entrée du lactose dans la cellule, qui en se liant à LacI va inactiver le répresseur de la perméase, permettant alors l’expression des 2 gènes lacZ et Y. Ces 2 gènes sont contigus et exprimés à partir du même promoteur et forment un opéron.
Sur un milieu contenant un analogue du lactose (Xgal), les colonies exprimant lacZ seront bleues et celles dont l’expression sera réprimée seront blanches.

Et aujourd’hui ?
Escherichia coli est actuellement toujours le modèle et l’outil de base dans les laboratoires de microbiologie mais aussi dans ceux de biologie cellulaire ou de biologie moléculaire. Il est un outil extrêmement puissant par sa simplicité d’utilisation notamment en raison de sa croissance rapide (temps de génération de 20 min), et de la multiplicité et de la diversité des outils génétiques existants chez ce microorganisme. E. coli est la « bête de concours » du clonage de gène ou de la production et la purification de protéines. Il existe également de multiples collections de mutants de chacun de ses gènes (voir panneau Au cœur de la matriX).

Références : Microbiologie, Luciano Paolozzi et Jean-Claude Liébart, édition DUNOD 2015